Sarh... aujourd\'hui et demain !

Interview à Radio LOTIKO

RADIO LOTIKO FM (Radio diocésaine)

Interview réalisé par Aubin-René ANGOULOU  le 12 juillet 2010

 

 

RLK - Mgr, vous vous déplacez souvent ces temps-ci. Pouvez-vous situer les auditeurs de Radio LOTIKO sur les motifs de ces déplacements ?

 

Mgr Edmond - Il est vrai que depuis le mois de novembre 2009 jusqu’à ce jour, j’ai eu à me déplacer souvent à l’intérieur ou à l’extérieur du diocèse.

A l’intérieur du diocèse, j’ai entrepris de faire le tour de toutes les paroisses du diocèse pour informer les communautés du synode, des difficultés de la vie du diocèse et du projet de création d’un nouveau diocèse et des jubilés prochains. J’ai visité toutes les paroisses du doyenné de l’ouest (Mandoul) et je suis resté dans chacune d’elle 3/4jours. Il ne restait dans le doyenné de l’Est(Sarh) que les paroisses de Djoli, Kyabé et les 4 paroisses de la ville de Sarh.

A l’extérieur, j’ai voyagé à Rome en janvier et en avril  pour les réunions du Comité permanent du synode dont je suis un des membres. Dernièrement, j’ai effectué un séjour du 16-26 juin en république Centrafricaine pour animer une session de formation permanente des prêtres dans le diocèse de Bossangoa.

Voilà les raisons de mes fréquentes absences de Sarh. Maintenant je ne bougerai plus sauf cas d’urgence. Je vais profiter de la saison et de Radio Lotiko pour atteindre les communautés de la ville et de la périphérie en attendant de boucler ma tournée du diocèse par Kyabé en octobre.

 

RLK - A mi-parcours de l’année 2010, comment évaluez vous cette année au plan de la vie de l’Eglise-Famille de Dieu qui est à Sarh, au Tchad et dans le monde?

 

Mgr Edmond - Cette année pastorale est marquée par deux évènements : le II° synode des églises d’Afrique et par la célébration de l’année sacerdotale.

Au niveau de l’Eglise-Famille de Dieu qui est à Sarh, je suis satisfait de toutes les réflexions que nous avons faites sur ces deux évènements. Nous avons prié avec nos prêtres et pour nos prêtres durant cette année sacerdotale et je suis heureux des célébrations paroissiales et diocésaines. Les fruits ne se sont pas faits attendre ...nos relations entre prêtres se sont beaucoup améliorées et nous en rendons grâces au Seigneur.

Au niveau de l’Eglise du Tchad, nous avons eu à vivre un temps de grâces exceptionnel avec le FORUM des prêtres qui s’est réuni à Moundou du 16 au 18 avril dernier. Nous avons réfléchi ensemble avec tous les prêtres assemblés sur les différents aspects de notre vie sacerdotale, nous avons célébré la réconciliation et clôturé par une mémorable célébration eucharistique de 4 heures…Nous avons rendu grâces au Seigneur pour le don du sacerdoce à l’Eglise et en particulier à notre Eglise-Famille de Dieu qui est au Tchad.

 

RLK - Notre Eglise se prépare à vivre de grands évènements, notamment les jubilés dont vous avez fait l’annonce officielle le 13 juin dernier. Comment entendez-vous les célébrer ?

 

Mgr Edmond - Effectivement, j’ai annoncé l’année jubilaire des 50 ans du LCCL et du diocèse de Sarh qui commencera le 22 décembre 2010 et se clôturera non pas le 22 décembre 2011, mais le 6 janvier 2012 pour des raisons de commodité.

Le comité de coordination des jubilés est en train de travailler pour élaborer des fiches qui permettront aux paroisses de s’organiser. A la réunion des curés en octobre, un calendrier des célébrations sera adopté et présenté à l’ensemble du diocèse.

Pour le moment, un concours de logo a été lancé par le sous-comité de communication et je crois que le comité de liturgie va bientôt lancer un concours de chants du Jubilé…et une prière du jubilé est en cours de traduction en langue et sera diffusée dès que la version sara sera prête.

 

RLK - Il a été question un moment de la division du diocèse de Sarh en deux…maintenant on en parle plus… Pouvez-vous nous en dire quelque chose ?

 

Mgr Edmond - Le projet de création du diocèse de Sarh remonte au Forum diocésain de 1999. Les démarches ont commencé en 2005 et aujourd’hui, les dossiers sont complets et nous attendons que le Pape prenne la décision d’ériger le nouveau diocèse et de nommer l’évêque.

Mais nous ne pouvons pas attendre les bras croisés. Nous devons mettre en place une structure minimale pour accueillir le nouvel évêque. Une maison où habiter, un bureau pour travailler et une Eglise qui lui servira de Cathédrale, même provisoirement. Le logement est déjà presque prêt….Mais c’est la crise financière qui frappe tout le monde y compris nos bienfaiteurs qui est notre principale difficulté…mais nous essayerons de faire de notre mieux en attendant la décision de Rome.

 

 

RLK - On parle de la restructuration du SAVE…Pouvez-vous en expliquer les raisons pour nos auditeurs ?

 

Mgr Edmond - Quand on crée une œuvre ou une institution, c’est pour répondre à un besoin. On n’a pas créé le SAVE pour le prestige, mais par nécessité. A la fin de la guerre civile, l’Eglise a réfléchi sur la manière la plus efficace pour aider à la reconstruction de la vie sociale fortement perturbée par la décennie de troubles qu’a connu le pays en général et la région du Moyen-Chari en particulier. Elle a créé le BELACD pour organiser et appuyer les efforts des différents groupes et associations qui veulent lutter contre le sous-développement.

Elle a ensuite créé le SAVE pour appuyer le BELACD en en produisant des matériaux audio-visuels dans les domaines de l’éducation, la santé humaine et animale, la promotion féminine et la culture. Après 25 ans de fonctionnement, le pays a beaucoup évolué et les besoins ne sont plus les mêmes. Le Tchad est entré entre temps dans le cercle des pays producteurs de pétrole…Il fallait que le BELACD se mette à la page en tenant compte des besoins nouveaux, de nouveaux partenariats et des nouvelles stratégies de développement…D’où la restructuration.

De même le SAVE qui est sensé appuyer le BELACD doit se mettre à la page car les besoins pour lesquels il a été créé ne sont plus les mêmes : on trouve sur le marché du matériel didactique que le SAVE produisait à des prix compétitifs, il y’a des réseaux de reproduction de et de distribution de films ainsi que des facilités d’enregistrement de disques qui n’existait qu’au SAVE.

Le cybercafé qui devait faire des recettes substantielles ne fonctionne plus par  manque compétence technique pour l’entretien des appareils…Avec les recettes qu’il génère, nous n’arrivons même pas à payer la location du satellite loué par Signis. Pire, le SAVE fait face à un piratage massif de ses produits …par exemple le film « Moussa et Christian » qui est un des meilleurs que nous ayons produit a été travesti avec le pseudonyme de « Tchad uni » et se vend à 500frws cfa alors que nous vendons le vrai à 4.500frs cfa au SAVE.

En conséquence…il y’a une mévente des produits du SAVE et la location des cassettes tourne au ralenti…donc peu de recettes…Si on ne peut plus vendre nos produits comme avant, il est impossible de continuer à produire…et il faut bien trouver de l’argent financer la production et pour payer tous ceux qui travaillent au SAVE.

C’est pourquoi nous avons commencé depuis 2005 à nous poser des questions sur l’Avenir du SAVE et sur organisation. Nous avons essayé de changer ce que nous pouvions pour alléger sa gestion et augmenter ses ressources…mais la crise financière actuelle nous amène à revoir nos capacités à gérer le SAVE comme il est actuellement vu que les ressources manquent cruellement. Même les amis qui nous aidaient à fonctionner sont frappés par la crise et ont suspendu l’aide indispensable qu’ils nous apportaient…

 

RLK - Certains parlent de la fermeture de Radio Lotiko…Est-ce vrai ?

 

Mgr Edmond - Il n’y a pas de fumée sans feu…La radio LOTIKO fait partie du SAVE et si le SAVE se restructure, la radio est aussi concernée. Il faudra aussi revoir son fonctionnement et surtout son coût. Nous n’avons ni subvention ni revenu fixe pour assure le fonctionnement de Radio Lotiko. Ce sont des amis de Palma en Espagne qui nous aident à faire marcher Radio Lotiko et nous ne cessons d’attirer l’attention des auditeurs sur ses difficultés financières mais malheureusement certains ne nous croient pas.…

Souvenez-vous de la semaine de solidarité avec Radio Lotiko que j’ai lancé l’année dernière…ce n’est pas une opération publicitaire, mais un SOS pour la survie de notre radio…elle nous a permis d’assurer l’équivalent d’un mois de fonctionnement…C’était déjà encourageant… mais on s’est contenté ensuite de faire comme avant…en croyant que les problèmes sont résolus avec le million de frs cfa que nous avons récolté…C’est beaucoup pour commencer, mais l’’effort n’a pas continué.

Le problème de la radio Lotiko est avant tout structurel. Si Radio Lotiko doit continuer, il faudra changer complètement son mode de gestion, s’assurer du degré d’engagement et de motivation de ceux qui l’animent autrement dit il faudra que tous, y compris les auditeurs changent de mentalité par rapport à Radio Lotiko. S’il faut changer de statut, on le fera après discernement.. Le problème financier n’est pas à négliger. S’il n’y a pas la possibilité de trouver des ressources sûres pour assurer le fonctionnement de Radio Lotiko, le diocèse de Sarh ne peut pas faire des miracles pour trouver les moyens de payer les employés et de maintenir cette radio comme elle fonctionne actuellement (8heures d’émission et une dizaine d’employés plus ou moins permanents). S’il y’a des personnes ou des groupes qui ont une solution, je serais prêt à les rencontrer pour recueillir leurs propositions concrètes et nous les analyserons avec la commission diocésaine des médias.

 

RLK - Que pensez-vous pour finir de la vie socio économique dans le diocèse en général et en particulier à Sarh

 

Mgr Edmond - Cette année, le territoire du diocèse de Sarh (Moyen-Chari et Mandoul) est sorti un peu de son état d’enclavement…la visite du chef de l’Etat au début de cette année a été l’occasion de nous mettre et de mettre nos problèmes au vu de ceux qui nous gouvernent. Les infrastructures socio-économiques en cours de réalisation sont prometteuses, même si l’octroi des marchés et la réalisation des ouvrages restent flous. Nous voulons surtout souligner l’importance du bitumage de l’axe Sarh-Doba et des principales artères de la ville de Sarh…pour le désenclavement de notre région. Nous sommes contents que les établissements scolaires aient fonctionné normalement et nous nous réjouissons aussi de la création d’instituts supérieurs qui permettent à nos jeunes de préparer des carrières professionnelles sur-place. Il reste à mettre en place une politique d’octroi de bourses d’études non seulement pour les institutions publiques, mais mêmes privées car les coûts de formation dans instituts privés sont élevés et les ressources des ménages ne permettent pas à tous ceux qui le peuvent d’y avoir accès.

 

RLK - Avez-vous un message particulier à adresser à nos auditeurs 

 

Mgr Edmond - Avec la difficile période de restructuration que nous allons engager, certains annoncent déjà la catastrophe et font croire que tout est perdu…Le bien qu’on a fait n’est jamais perdu et nous devons sauver le bien qu’il est encore possible de faire. Comme je l’ai fait pour le BELACD, j’encourage les collaborateurs et collaboratrices à avoir une attitude responsable par rapport à ce bien commun qu’est le SAVE et que nous voulons sauver en le restructurant. Nous aurons pendant toute l’année jubilaire à évoquer la mémoire du Père fondateur de notre diocèse Mgr Henri VENIAT…dont c’est la fête demain. Il terminait toutes ses conversations par deux mots devenus légendaires : « courage et confiance ». Moi j’en ai ajouté un troisième : persévérance…Donc à tous les animateurs et animatrices, à tous les auditrices et auditeurs de Radio Lotiko, je dis : « courage, confiance et persévérance».



13/07/2010
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 66 autres membres